Un constat : nos métiers se transforment et nous avons du mal à mettre des mots sur ce qui nous pose problème.
Depuis plusieurs années déjà, au fil de réformes dont on perçoit souvent mal les tenants et les aboutissants, des injonctions - souvent contradictoires - s’imposent progressivement à nous.
On nous explique que le statut c’est dépassé. On veut individualiser nos parcours. On nous parle de compétence. On ringardise les diplômes.
A coup d’objectifs, de contractualisations, d’indicateurs de performance, d’évaluations de toutes sortes, de réunions diverses, ces évolutions typiques de la mise en œuvre du Nouveau Management Public transforment lentement mais sûrement nos pratiques professionnelles et au bout du compte nos métiers. Souvent en contradiction avec les principes qui nous ont fait choisir le service public.
Une certitude : cette transformation génère des doutes et induit une souffrance professionnelle chez beaucoup d’agents.
En résultent plusieurs questions mortifères : perte de sens de nos métiers, remises en cause des savoirs, isolement des individus alors même que l’injonction du travail en équipe n’a jamais été aussi forte.
La mise en concurrence devient un maître mot : entre les établissements, entre les équipes, entre les agents, entre le public et le privé. Les collectifs de travail s’estompent et lorsque les objectifs – quels objectifs et avec quelle pertinence ? – ne sont pas atteints, les agents sont renvoyés à une pseudo responsabilité individuelle.
Un questionnement : que devient le service public ? Quel est le rôle qu’on lui assigne et pourquoi ?
Pour beaucoup d’entre nous, le service public a pour vocation de servir l’intérêt général, de permettre à tous et à chacun d’être soigné, instruit, formé... de la même manière, partout sur le territoire national. Le service public est, doit être et doit rester un instrument de la redistribution des richesses produites au service de la collectivité.
Les politiques néolibérales mises en œuvre par tous les gouvernement qui se sont succédé depuis le milieu des années 1970 ont progressivement remis en cause ces principes hérités de Conseil National de la Résistance.
Sans débat démocratique, au nom de la « bonne gouvernance », l’Etat a progressivement été mis au service de la concurrence, contre les personnels, contre les citoyens, contre l’intérêt général.
Une demande : celle des personnels qui sont en quête de sens autour de leurs métiers et de leurs missions.
Au fil des années, beaucoup des auteurs de cet ouvrage à plusieurs mains ont animé des stages, répondu aux questions des personnels, réfléchi à des solutions. Il était devenu nécessaire de fournir aux collègues un outil d’analyse, de réflexion, de compréhension et d’action, au-delà de la diversité de nos métiers. Avec aussi un regard sur ce qui se passe ailleurs, dans les établissements français de l’étranger ou dans les systèmes éducatifs des autres pays du monde. Parce que diversité éclaire et enrichit.
Un outil pour comprendre, des moyens pour agir, des idées pour avancer.
Chercheurs, professeurs, CPE, Co-Psy, chefs d’établissements, commissaires paritaires, militants du SNES, du SNUPDEN, de la FSU... les auteurs de cet ouvrage cherchent à donner au lecteur des outils pour reprendre la main sur leurs métiers. De la construction du rapport de force au recours à la loi, de la remise en place des collectifs de travail à l’élaboration d’un projet équilibré, où tous les acteurs de nos métiers sont partie prenante, notre but est d’aider chacun à réfléchir et avancer, à construire plutôt qu’à subir. Un ouvrage tous publics, destiné à ceux qui militent (les s1 ou les s2 en particulier) comme à ceux qui, sans forcément militer, sont eux aussi des professionnels de l’éducation et veulent réfléchir à l’évolution de leur métier au quotidien.